L’interview du mois : Fanny Moizant, Présidente et Co-fondatrice chez Vestiaire Collective

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Fanny Moizant, Présidente et Co-fondatrice chez Vestiaire Collective : “Notre marché bénéficie d’une croissance exponentielle”

En octobre 2009, Fanny Moizant crée Vestiaire Collective avec six cofondateurs afin de trouver une solution digitale et durable à la surconsommation de la mode et à l’influence du fast fashion. Aujourd’hui, Vestiaire Collective est la première application mondiale de mode de seconde main. Elle se consacre à promouvoir la mode circulaire en tant qu’alternative aux pratiques nuisibles de l’industrie de la fast fashion.

1/ Pouvez-vous vous présenter ainsi que Vestiaire Collective? Comment est-ce que cela marche?

Je suis née dans le sud de la France où j’ai passé une grande partie de mon enfance et adolescence. Je baigne dans la mode depuis mon plus jeune âge grâce à ma mère qui était propriétaire de plusieurs boutiques de prêt-à-porter.

En 2001, j’obtiens un diplôme en marketing de l’école de commerce NEOMA. J’ai ensuite travaillé pour plusieurs marques de mode, telles que John Galliano, Dim et Mexx, avant de rejoindre Venilia.

En 2007, j’ai voulu revenir à la mode, mon premier amour. Cette décision m’amène à l’Institut Français de la Mode (IFM) ou j’obtiens un diplôme en management. Il s’agissait pour moi du meilleur moyen d’équilibrer mes aspirations créatives et commerciales.

Lors de mon cursus à l’IFM, je décide de re-connecter avec mes racines familiales entrepreneuriales et l’idée de Vestiaire Collective s’impose rapidement. La mode avait tant évolué sous l’influence de la fast fashion, la surconsommation battait son plein, les placards explosaient: un gâchis incroyable!

Une fois Vestiaire Collective implanté en Europe, je quitte Paris pour Londres, avant de m’installer à Hong Kong en 2017 pour mener l’expansion de l’entreprise en Asie-Pacifique.

Vestiaire Collective est une plateforme qui met en relation une communauté passionnée de mode en lui donnant l’opportunité de revendre et d’acheter des pièces. Le résultat? La plus grande garde-robe connectée au monde.

Plus de 550,000 nouveaux articles sont mis en vente chaque mois, ce qui permet à nos acheteurs de dénicher des pièces de mode convoitées tout en participant au mouvement de la mode circulaire.

Nos articles peuvent être authentifiés par nos experts présents dans nos trois hubs à travers le monde afin de garantir la confiance et la qualité. Nous proposons aussi le service d’Envoi Direct pour certains articles éligibles localement. Dans ce cas, l’article transite directement du vendeur à l’acheteur.

La force de Vestiaire repose sur sa communauté internationale de 11 millions de membres, proposant plus de 3 millions de pièces rares et recherchées et un service de confiance.

2/ Comment vous est venue l’idée de fonder Vestiaire Collective? Quel message voulez-vous faire passer à travers votre société?

Après avoir donné naissance à mes filles, je voulais entreprendre. Je voyais que beaucoup de mes amis possédaient de belles pièces de créateurs qu’ils ne portaient plus. Cependant, ils n’avaient aucun endroit approprié pour vendre ces pièces incroyables. C’était un vrai gaspillage!

L’idée initiale fut d’intégrer une solution durable dans l’écosystème de la mode, ce qui a rapidement conduit à la création de Vestiaire en 2009. L’entreprise a été fondée sur deux principes:

  • La confiance : Notre modèle offre un service d’authentification pour acheter en toute sérénité.
  • L’inspiration: Notre marque bouleversait le paysage en s’inspirant des codes du luxe et en mettant en valeur les plus belles pièces des gardes-robes de notre communauté internationale.

Au fil des années, cette approche transforma l’industrie en modifiant les habitudes de consommation: vendre plus, acheter moins et mieux. Aujourd’hui, la circularité résonne encore plus fort !

3/ Depuis sa création, quelles ont été les étapes importantes pour Vestiaire Collective? Comment êtes-vous arrivé à ce succès?

La création de Vestiaire Collective en octobre 2009.

Un positionnement fort centré autour du luxe, d’une ligne éditoriale inspirée des plus grands magazines de mode et de la mise en avant de profils d’influenceurs et de célébrités telles que Jeanne Damas,  Kate Moss, Kim Kardashian et des pièces iconiques des plus grandes marques de mode.

La transition d’une start-up à une multinationale avec une expansion européenne en Angleterre, en Italie et en Allemagne puis internationale aux Etats-Unis et en Asie.

L’arrivée de notre CEO, Maximilian Bittner, en mars 2018

La dernière levée de fonds de 178 Millions d’€ en mars 2021 soutenue par Kering et Tiger Global comme investisseurs principaux

Le lancement de notre programme Brand Approved au service des Maisons de luxe et des plateformes digitales (Alexander McQueen, Mulberry, MyTheresa et bien plus de marques à venir!) en faveur d’une mode plus durable.

Nous devons notre succès à notre communauté engagée, mais aussi à nos équipes d’experts qui s’appliquent tous les jours à améliorer notre expérience unique et faciliter davantage la vente et l’achat de manière circulaire et responsable!

4/ Quelles sont vos opinions sur le futur du e-commerce d’occasion? Est-ce un marché en pleine expansion? Observez-vous des tendances différentes dans les régions ou Vestiaire Collective est présent ?

Le marché de la revente a gagné en popularité en réponse à un changement de mentalité des consommateurs vis-à-vis de leur garde-robe.

Notre marché bénéficie d’une croissance exponentielle – celle-ci est due à plusieurs facteurs:

  • L’éco-responsabilité: Les motivations ont changé, les consommateurs sont plus sensibles à la durabilité des leurs pièces et au mouvement circulaire, alors qu’il y a quelques années l’accessibilité était leur première motivation. Il y a une réelle prise de conscience!
  • L’usage à la possession: De plus en plus de consommateurs privilégient l’usage à la possession et considèrent investir dans des pièces de seconde-main.
  • Accessibilité: Le marché de l’occasion est une excellente introduction au monde du luxe pour les consommateurs qui ne sont pas en mesure de s’offrir des articles neufs.
    • 71 % des consommateurs choisissent d’acheter des pièces de seconde main car c’est un moyen d’accéder à des articles de qualité plus abordables (étude BCG 2020).
  • L’attrait des Gen Z pour le marché du luxe vintage: Notre large gamme de marques et d’articles vintage attirent tous types d’acheteurs, notamment les plus jeunes générations, qui sont à la recherche de pièces d’exception à des prix plus abordables.

Tous ces facteurs entraînent un changement fondamental dans nos habitudes de consommation et contribuent à la croissance du marché de la revente.

Nos membres peuvent trouver des articles iconiques et intemporels ainsi que des tendances internationales peu importe leur localisation. En parallèle, notre communauté peut aussi rechercher des pièces localement qui sont influencées par des influences culturelles, sociales et économiques.

5/ Que conseilleriez-vous aux professionnels du retail traditionnel au vu de cette tendance ? Si des professionnels du retail traditionnel souhaitent proposer de la vente de seconde main, comme l’a fait La Redoute par exemple avec La Reboucle, que leur conseilleriez-vous ?

Cela fait plus de 10 ans que nous travaillons sur la transformation de l’industrie et les mentalités sur la mode circulaire. C’est donc une bonne nouvelle que les acteurs de la première main et du retail revoient leur business model pour inclure la seconde-main!

Ceci étant dit, le marché a beaucoup de spécificités et reste complexe. Cela demande une expertise que nous maîtrisons depuis le début; c’est d’ailleurs pour cette raison que certaines Maisons comme Alexander McQueen ou plus récemment la plateforme digitale Mytheresa travaillent avec nous à travers notre programme ‘Brand Approved’ afin de les accompagner sur la seconde main.