Interview du mois – Pauline Poissonnier, Business Solution Manager en charge de l’offre Reflex Web d’Hardis Group

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Nous avons interrogé Pauline Poissonnier, Business Solution Manager en charge de l’offre Reflex Web d’Hardis Group, une société de conseil, services numériques et éditeur de logiciels spécialisée dans la transformation de la supply chain depuis 1984. Hardis Group est notamment connu pour sa suite logicielle Reflex et son drone Eyesee capable de réaliser des inventaires de manière autonome.  

 

1/ Comment est née la solution Eyesee et à quel stade de développement en êtes-vous ?

C’est un des collaborateurs d’Hardis Group qui, au travers de rencontres avec ses clients, a observé la difficulté de réaliser les inventaires en entrepôts et a eu l’idée d’utiliser un drône pour faciliter cette tâche.  Hardis Group l’a accompagné dans le projet, qui a remporté un succès immédiat sur le marché, avec des prix sur le salon CES de Las Vegas et de Shanghai. Nous sommes actuellement en phase de certification et d’industrialisation de la solution. Une trentaine de drones ont été vendus à des clients industriels et retailers, tels que volvo, L’Oréal ou FM Logistique.

2/ Quelle valeur la solution Eyesee apporte-t-elle aux e-commerçants ?

Il y a quatre principaux enjeux. Tout d’abord, l’amélioration de la sécurité et des conditions de travail, car avec la solution il n’y a plus besoin de faire travailler les opérateurs en hauteur sur des nacelles, ce qui réduit les risques d’accident. Ensuite, la solution permet de réduire les coûts nécessaires à l’inventaire (pas d’achat de nacelles ou autres équipements nécessaires aux opérateurs) et d’établir les inventaires en un temps record. L’inventaire d’un emplacement prend six secondes, ce qui réduit le temps nécessaire en moyenne par cinq. Les clients ont un retour sur leur investissement dès 12 à 15 mois après l’achat.

Pour les e-commerçants, la solution offre un avantage supplémentaire : elle permet d’augmenter la fréquence des inventaires, et donc de gagner en précision du stock disponible et éviter les ruptures de stock. Par exemple, un retailer dans l’ameublement a réalisé un pilote avec le drone dans ses magasins, qui lui servent d’entrepôts, et a pu augmenter ses ventes e-commerce.

3/ Quelles autres solutions d’automatisation sont en train de transformer la logistique pour les e-commerçants? Quelles sont les plus prometteuses ?

La difficulté pour l’e-commerce, c’est que la logistique est une préparation de détail qui nécessite beaucoup de ressources et varie très fortement selon les périodes avec des pics pendant les soldes par exemple. Investir dans une mécanisation juste pour gérer ces pics, représente un manque de flexibilité et un frein à la mise en oeuvre de l’automatisation chez les e-commerçants. C’est pourquoi on a vu surtout des acteurs plus larges qui s’équipaient comme La Redoute. Ce qui est en train de faire changer les choses c’est la robotique, qui offre plus de flexibilité. Le retailer 4Murs par exemple a fait le choix de mettre en place une solution AutoStore, un système de stockage compact et de préparation des commandes entièrement automatisé.  Plusieurs retailers ont investi dans des robots autonomes fournis par Exotag ou encore Scallog. Cela permet d’augmenter le nombre de robots déployés au rythme de la croissance et des besoins. 

Nous observons également une tendance à ouvrir des sites de micro-fulfillment, c’est-à-dire des petits sites logistiques, proches des villes (parfois même dans des espaces de magasin), pour pouvoir livrer les clients plus rapidement. Ces espaces étant plus chers, ils ont intérêt à optimiser au maximum, d’où le recours plus important à l’automatisation.

Au-delà des robots, il y a une croissance de la demande pour des solutions qui aident les collaborateurs comme les Cobots qui suivent les préparateurs, les lunettes ou les gants connectés, la reconnaissance visuelle ou vocale etc.

4/ Quels sont les principaux challenges que vous rencontrez avec Eyesee, ou avec d’autres solutions d’automatisation?

L’un des principaux défis est d’éduquer les clients sur la simplicité d’utilisation et la sécurité de ces solutions.  Ca se travaille dès la conception de la solution. On installe par exemple des capteurs qui forment une bulle de sécurité autour du drone et l’arrêtent automatiquement en cas de risque. 

Un des freins principaux pour les clients est de s’assurer d’un ROI. On observe de plus en plus d’intérêt des directions métiers qui nous contactent directement, alors qu’autrefois nous étions plutôt contactés par les directions innovation des entreprises.  On a changé de public.

Enfin, un des grands défis est d’arriver à intégrer ces solutions au système applicatif des clients et à leurs processus. L’offre d’Hardis Group aide les clients à réaliser ces intégrations techniques, et piloter et coordonner le travail des opérateurs et des robots, grâce à des algorithmes qui permettent de distribuer le travail de façon intelligente.

5/ Quel a été et sera à long terme l’impact du covid-19 sur l’automatisation de la logistique?

La crise sanitaire a accéléré une tendance de fond. Au pic de la crise, les acteurs industriels ou retailers ont eu des difficultés à trouver des ressources et de la disponibilité pour assurer la supply chain. Avec la robotique, ils vont gagner en agilité, en flexibilité, pour pouvoir gérer ce genre de période sans devoir embaucher de nouveaux collaborateurs. La crise a fait avancer ces réflexions, d’autant que la logistique e-commerce est clé pour pouvoir réagir rapidement dans ce contexte.