Interview du mois – François Vandeplanque, Co-fondateur et CEO de Popsell

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1/ Pouvez-vous présenter Popsell ainsi que votre rôle au sein de cette structure ?

Je suis le co-fondateur et le CEO de Popsell. Popsell est pionnier depuis plus de 10 ans dans la création de solutions de commerce centrées sur l’humain : nous innovons pour remettre l’humain au cœur du commerce des marques, à la fois sur le web et en magasin. Nous avons collaboré avec les plus grands retailers en France et en Europe. Depuis 2021, nous avons co-construit une plateforme de Personal Shopper Omnicanale, qui est le fruit d’une collaboration étroite avec les équipes Retail de Thom Group, le leader européen de la bijouterie.

Cette plateforme obtient un succès remarquable chez Histoire d’Or en France, et chez Stroili en Italie, tant par son impact sur les ventes, que par son succès auprès des équipes en magasin.

L’idée de départ était de capitaliser sur les compétences des vendeurs, en étendant leur rôle et leur champ d’action sur le web. Le vendeur n’est plus cantonné à son magasin :

  • il peut recruter des clients sur les réseaux sociaux,
  • il peut convertir les visiteurs sur le site Web,
  • les faire venir en magasin (Web to store),
  • et également établir une relation en ligne durable avec les clients rencontrés en magasin (Store 2 web).

2/ Comment gérer la diversité des attentes des clients entre les canaux physiques et digitaux ? Comment une entreprise peut-elle garantir une cohérence et une expérience client fluide entre ses magasins physiques et son site web ?

Il faut d’abord mettre en place les fondamentaux de l’omnicanalité, et certaines enseignes sont encore en retard : une vision unifiée des achats web et magasin, le programme de fidélité, les bons d’achats, la gestion des prix, le drive to store, la vision des stocks du magasin, l’extension de gamme en magasin, etc. Très important, un bon outil de clienteling doit donner aux vendeurs une vision complète de l’historique des interactions entre le client et la marque, et que le vendeur soit outillé pour répondre à toutes les questions potentielles de leurs clients, comme l’état d’avancement d’une commande.

Une fois ces fondamentaux mis en place, on peut aller construire des scénarios de relation client beaucoup plus innovants, et renforcer l’expérience client.

Par exemple, chez Histoire d’Or, une wishlist établie sur le web sera aussi consultable par les vendeurs en magasin. A l’inverse, cette liste peut être remplie par le vendeur en magasin, que son client pourra consulter et convertir une fois chez lui. Sur ce sujet, nous allons encore plus loin, en mettant en place des scénarios de « panier abandonné » en magasin. Le principe, c’est qu’un client qui hésite avant un achat important ne reparte pas dans la nature et finalise son achat chez un concurrent. Le vendeur va pouvoir établir un lien conversationnel avec son client : une conversation en ligne est initiée, où le vendeur résume la visite et les articles qu’il lui a présentés. Une fois chez lui, le client peut poursuivre la conversation avec le vendeur quand il le souhaite ! Et le vendeur peut lui-même être proactif, en relançant son client 2 jours après, par exemple.

Un autre scénario omnicanal que nous mettons en place et qui a un très gros succès, c’est que les conseillers disponibles en ligne soient les mêmes qu’en magasin ! En tant que client, que je puisse établir un contact avec l’équipe du magasin proche de chez moi (cela représente 34% des demandes de conversation chez nos clients). Et que je puisse établir une relation à long terme avec ces conseillers (le concept du Personal Shopper).

Pour finir, dernier élément fondamental pour le succès de ces expériences omnicanales impliquant les vendeurs : que le web ne soit pas vu comme un concurrent ! Il est impératif que le vendeur qui a conseillé un client en ligne soit commissionné sur une vente qui se finalise dans un autre magasin. Ou qu’à la suite d’une rencontre en magasin, le conseiller soit quand même commissionné si l’achat se finalise sur le web quelques jours après. Pour l’anecdote, chez l’un des leaders français des produits culturels et techniques, les vendeurs préfèrent imprimer une fiche produit sur papier plutôt que de partager une URL, pour limiter les risques que le client reparte et achète en ligne, au lieu de revenir !

Les vendeurs peuvent optimiser leurs temps morts en convertissant des visiteurs sur le web, ou en les amenant en magasin. Le web n’est plus un concurrent, il devient un apporteur de ventes additionnelles !

3/ La généralisation de l’IA et de la réalité augmentée va-t-elle selon vous permettre une meilleure gestion de l’expérience client phygitale ?

La réalité augmentée sert à créer des expériences d’achat plus immersives et engageantes. Mais elle sert surtout à pallier les manques de l’expérience en ligne par rapport à celle des magasins, notamment l’absence du toucher et de l’essayage. Il y a plein d’innovations dans ce secteur grâce à l’IA, notamment pour toutes les problématiques de taille, qui génèrent trop de retours. Je pense par exemple à la start-up Fringuant que j’ai découverte à Paris Retail Week.

L’IA est évidemment très crédible sur le service client en ligne, pour automatiser des réponses avec des Chats bots, et ainsi dégager du temps précieux aux équipes magasin. Mais attention à son utilisation : l’IA générative pour conseiller des produits génère beaucoup trop d’hallucinations.

Une anecdote à ce propos, sur le site de l’un des leaders français du bricolage, je me suis renseigné sur la disponibilité d’une courroie pour une tondeuse à gazon électrique. Le bot m’a trouvé la référence, la description, le prix (17,90€), puis ma certifié la disponibilité de la pièce dans le magasin près de chez moi. Je m’y suis rendu, et après avoir passé 20 minutes au SAV, puis 45 minutes avec le chef de rayon, le constat a été sans appel : le bot avait totalement inventé cette pièce, avec une description et un prix très cohérents !

De notre côté, nous utilisons uniquement les LLM pour leur capacité de traitement du langage naturel, et du RAG (Retrieval-Augmented Generation) pour garantir les réponses fournies, car uniquement tirées d’un apprentissage sur les bases de connaissances de la marque, d’appels à leurs APIs ou leur catalogue.

Surtout, c’est la capacité du Bot à transférer à tout moment les demandes aux équipes magasin qui fera toute la différence en termes de qualité dans la relation, les plus à même de générer de l’émotion, de la confiance, et de la fidélisation.

Par ailleurs, l’IA est très utile pour « augmenter » les équipes de vente :

  • les aider dans les conversations en ligne pour proposer ou reformuler les réponses,
  • les aider dans l’analyse de centaines de conversations quotidiennes pour détecter les clients insatisfaits, et y remédier rapidement,
  • les assister dans relances pro-actives, de manière hyper-personnalisée.

4/ Quelles tendances émergentes voyez-vous dans ce domaine et comment anticiper les évolutions futures dans le commerce omnicanal ?

Une chose est sûre, le magasin ne sera jamais remplacé ! Il reste un lieu d’échange, de convivialité, un lieu émotionnel. D’ailleurs on voit un recul aux US et aussi en France sur les caisses automatiques, et le retour des « humains ». En partie pour des questions de fraude, c’est vrai, mais pas uniquement.

Vos vendeurs en magasin ne sont pas encore des robots ! Capitalisez sur eux, fournissez-leur des outils pour augmenter leurs performances et leur champ d’action.